
Intégration des réflexes archaïques : entre fondements neurologiques et rigueur professionnelle
15/07/2025
Réflexes archaïques et troubles d’apprentissages : liens et limites de l’intégration des réflexes dans la prise en charge des troubles
22/10/2025Le rôle des réflexes archaïques dans le développement postural de l'enfant
Le développement postural du nourrisson, de la naissance jusqu’à la marche, repose sur un enchaînement d’étapes neuromotrices finement orchestrées. Ces acquisitions sont rendues possibles par la présence puis l’intégration progressive des réflexes archaïques — des automatismes moteurs d’origine sous-corticale, témoins de la maturation du système nerveux central. Ces réflexes préparent les bases du tonus, de l’équilibre, de la coordination et de la motricité volontaire.
Les réflexes archaïques : fondements du développement moteur
Présents dès la vie intra-utérine, les réflexes archaïques assurent la survie (succion, agrippement, Moro…), la protection et la mise en place des schémas moteurs fondamentaux. Au fil des mois, le cortex cérébral prend le relais sur les structures plus primitives (tronc cérébral, moelle), permettant leur intégration et la mise en place du contrôle volontaire.
Leur persistance au-delà de l’âge attendu peut entraîner des troubles posturaux, moteurs, attentionnels ou cognitifs et émotionnels.
Les grandes étapes du développement postural (0 à 18 mois)
Le développement postural suit une progression céphalo-caudale (de la tête vers les pieds) et proximo-distale (du tronc vers les extrémités). Chaque étape correspond à l’intégration de réflexes et à l’émergence de nouvelles coordinations.
De la naissance à 3 mois : l’adaptation tonique et la radiation du nombril
Le nouveau-né présente une posture en flexion globale, héritée de la vie intra-utérine.
Le réflexe de radiation du nombril se manifeste par une activation tonique centrée autour du tronc : toute stimulation du nombril entraîne une réaction radiale du corps (mouvements en étoile). Ce réflexe participe à la première organisation tonique autour du centre du corps, véritable base de la future stabilité posturale.
Durant cette période, le bébé commence à lever légèrement la tête en position ventrale — première expression du redressement céphalique.
3 à 6 mois : émergence du contrôle de la tête et du tronc
- Réflexe de Moro : déclenché par une perte de soutien ou un stimulus sensoriel soudain, il provoque une extension des bras suivie d’une flexion et d’un repli protecteur. Ce réflexe favorise la régulation du tonus et le développement des réactions d’ouverture/fermeture, bases de la future coordination bilatérale. Son intégration vers 4–6 mois permet l’installation de la sécurité posturale et émotionnelle.
- Réflexe tonique asymétrique du cou (RTAC) : lorsque la tête tourne d’un côté, les membres du même côté s’étendent, tandis que ceux du côté opposé se fléchissent. Ce réflexe facilite la coordination œil-main et prépare les mouvements de dissociation droite/gauche nécessaires au retournement dos-ventre.
Le bébé commence à se tourner, à se redresser sur les avant-bras, puis sur les mains : les muscles posturaux se renforcent.
6 à 9 mois : redressement global et préparation à la verticalité
- Réflexe de Landau : en suspension ventrale, l’enfant redresse la tête, puis le tronc et les jambes. Ce réflexe illustre la synergie d’extension du corps et favorise le développement du tonus postérieur essentiel au maintien assis puis à la station debout.
- Réflexe de Galant : une stimulation du flanc provoque une incurvation latérale du tronc du côté stimulé. Ce réflexe participe à la mobilité rachidienne, au retournement et à la marche ultérieure. Il doit être intégré vers 9 mois pour permettre un contrôle axial fluide.
Durant cette phase, le bébé maîtrise la position assise, explore la reptation puis le quatre pattes, exerçant son équilibre et sa coordination bilatérale.
9 à 12 mois : coordination et verticalisation
- Réflexe tonique symétrique du cou (RTSC) : lorsque la tête s’abaisse, les bras se fléchissent et les jambes s’étendent ; lorsque la tête se redresse, l’inverse se produit. Ce réflexe aide à la coordination des membres quand bébé rampe et à la préparation à la position à quatre pattes. Son intégration vers 10–12 mois permet l’organisation de la dissociation tête-tronc indispensable à la verticalisation.
- Réflexe tonique labyrinthique (RTL) : il module le tonus en fonction de la position de la tête par rapport à la gravité (flexion ou extension). Son intégration est essentielle pour la régulation du tonus global et l’adaptation posturale à la pesanteur.
12 à 18 mois : équilibre, marche et intégration fine
- Réflexes d’agrippement (palmaire et plantaire) : présents dès la naissance, ils disparaissent progressivement pour laisser place à la préhension volontaire et à l’appui plantaire. Leur intégration conditionne la stabilité du pas et la motricité fine.
- Réflexes des pieds (Babinski, marche automatique, etc.) : les réactions plantaires primitives préparent la mise en charge, le déroulé du pied et l’équilibre. Leur disparition progressive signe la maturation motrice et posturale.
Le bébé atteint la marche autonome entre 12 et 18 mois, fruit de la maturation neurologique, de la régulation tonique et de l’intégration de l’ensemble des réflexes archaïques.
De l’automatisme à la maîtrise : l’intégration réflexe
L’intégration des réflexes archaïques ne signifie pas leur disparition, mais leur inhibition fonctionnelle : ils deviennent des schémas de base disponibles pour des actions volontaires plus complexes.
Le développement postural s’appuie donc sur une orchestration neuro-motrice hiérarchique, où chaque étape prépare la suivante.
Une persistance de certains réflexes (Moro, RTAC, Galant…) peut perturber la posture, la motricité, la gestion des émotions ou les apprentissages. D’où l’intérêt d’évaluer et d’accompagner leur intégration harmonieuse avec un praticien formé et compétent.
Conclusion
Les réflexes archaïques constituent le socle sur lequel s’érige le développement postural. De la radiation du nombril à la marche, chacun d’eux contribue à la structuration du tonus, à la coordination et à la construction du schéma corporel.
Leur observation et leur intégration harmonieuse témoignent de la maturation neurologique et du développement global de l’enfant. Il est possible d’entreprendre un travail d’intégration à tout âge.
Cécile Warrot, kinésiologue et enseignante





