
Réflexes archaïques et troubles d’apprentissages : liens et limites de l’intégration des réflexes dans la prise en charge des troubles
22/10/2025Le Réflexe Tonique Asymétrique du Cou : un acteur méconnu du développement de l’enfant
Nous observons tous, un jour ou l’autre, un bébé qui tourne la tête d’un côté et qui, dans le même mouvement, tend son bras et sa jambe du côté où il regarde.
Ce geste, qui paraît anodin, est en réalité le signe d’un réflexe fondamental : le Réflexe Tonique Asymétrique du Cou, ou RTAC.
Ce réflexe reste très peu connu du grand public, alors qu’il joue un rôle essentiel dans le développement moteur, visuel, émotionnel et même scolaire de l’enfant.
Dans cet article, je vous propose de comprendre simplement pourquoi il est si important, et ce qu’il peut se passer s’il n’est pas complètement intégré dans les premiers mois de vie.
Le RTAC, c’est quoi exactement ?
Le RTAC est un réflexe archaïque, c’est-à-dire un automatisme avec lequel tous les bébés naissent.
Quand la tête se tourne, le corps s’organise automatiquement :
- du côté du regard : bras et jambe s’étendent,
- du côté opposé : bras et jambe se fléchissent.
On parle souvent de « posture de l’escrimeur ».
Mais ce réflexe ne sert pas à faire joli : il est le témoin d’un cerveau qui se structure.
Un réflexe qui commence… avant même la naissance
Vers le 4ᵉ ou 5ᵉ mois de grossesse, le bébé commence déjà à tourner sa tête.
À chaque rotation, le RTAC s’active.
Ces micros-mouvements répétés contribuent à :
- renforcer les muscles du cou et des épaules,
- établir les premières connexions entre la tête et les bras,
- développer la conscience du corps,
- préparer les futures coordinations.
Même lové dans l’utérus, le bébé s’entraîne déjà pour ses futurs apprentissages.
Pendant la naissance : un réflexe qui aide le bébé à venir au monde
Ce que l’on sait moins, c’est que le RTAC joue aussi un rôle pendant l’accouchement.
Lorsque le bébé descend dans le bassin, il doit effectuer plusieurs rotations.
À chaque rotation de la tête, le RTAC s’active et aide son corps à se positionner et à progresser dans le canal de naissance.
C’est une véritable chorégraphie instinctive, programmée par la nature.
Après la naissance : un soutien discret mais essentiel
On pense souvent que ces réflexes archaïques disparaissent.
En réalité, ils s’intègrent, c’est-à-dire qu’ils deviennent silencieux pour laisser place aux mouvements volontaires.
Le RTAC est normalement intégré entre 3 et 9 mois.
Durant cette période, il soutient :
- Le développement moteur
- rouler d’un côté à l’autre,
- ramper puis aller à quatre pattes,
- préparer la coordination droite-gauche.
- La vision et les apprentissages futurs
- suivre un objet du regard,
- croiser la ligne médiane (essentiel pour lire et écrire),
- coordonner les yeux et les mains.
- Le développement émotionnel
Des mouvements équilibrés droite/gauche favorisent l’apaisement du système nerveux.
Les réflexes archaïques ne sont pas des reliques : ce sont des fondations.
Et si le RTAC reste actif ? Les signes à observer
Chez certains enfants, le RTAC ne s’intègre pas totalement.
Ce n’est pas grave en soi, mais cela peut créer des difficultés subtiles dans la vie quotidienne, à la maison comme à l’école.
Voici les manifestations les plus courantes :
✋ Motricité et posture
- difficultés à ramper ou à aller à quatre pattes,
- raideurs cervicales ou tête tournée toujours du même côté,
- posture avachie,
- maladresse dans les activités demandant une coordination droite-gauche.
✍️ Écriture et tâches scolaires
Lorsqu’un enfant tourne la tête pour regarder le tableau, le bras peut bouger involontairement si le RTAC est encore actif.
Conséquences possibles :
- tenue du crayon crispée,
- feuille qui tourne sans cesse,
- fatigabilité à l’écriture,
- inversions de lettres ou sauts de mots,
- difficultés à suivre une ligne.
👁 Vision fonctionnelle
- convergence oculaire difficile,
- sauts de mots en lecture,
- fatigue visuelle rapide.
💛 Émotions et comportement
- irritabilité lors des tâches demandant précision et contrôle,
- agitation,
- hypersensibilité au stress.
Rien de tout cela n’est une fatalité : l’enfant peut apprendre à intégrer ce réflexe à tout âge.
Le cordon autour du cou peut-il influencer le RTAC ?
C’est une question fréquente et parfaitement légitime.
✔ Ce que l’on sait
Un cordon autour du cou peut limiter la liberté de mouvement de la tête lorsque le bébé est dans le ventre.
Comme le RTAC se développe grâce aux rotations répétées de la tête, une mobilité réduite pourrait diminuer la stimulation du réflexe.
C’est une explication possible lorsque l’on observe :
- une préférence pour tourner la tête d’un côté,
- des tensions cervicales,
- une asymétrie des épaules,
- un démarrage difficile dans les mouvements croisés.
✔ Ce que l’on ne doit pas en conclure
- Le cordon autour du cou ne cause pas automatiquement un problème.
- La majorité des bébés concernés vont très bien.
- Il s’agit d’un facteur parmi d’autres, jamais d’un diagnostic en soi.
L’objectif est de comprendre, pas d’inquiéter.
Que faire pour soutenir l’intégration du RTAC ?
La bonne nouvelle, c’est que le cerveau des enfants est extrêmement plastique.
Même si un réflexe reste actif, il peut être intégré à tout âge.
Voici des pistes simples :
À la maison
- jeux au sol : ramper, quatre pattes, tunnels, parcours moteurs
- activités de mouvements croisés (main droite/genou gauche, etc.)
- jeux de balle, rubans de gym, cerceaux
- limiter les écrans pour encourager le mouvement réel
À l’école
- proposer des pauses motrices, même courtes
- encourager les activités qui croisent la ligne médiane
- accepter certaines compensations posturales au besoin
- varier les supports d’écriture (tableau vertical, ardoise, tablette lumineuse…)
Faire appel à un professionnel si nécessaire
Un praticien en réflexes archaïques peut évaluer tranquillement et proposer des exercices ciblés, souvent très ludiques. Il peut également trouver le stress à l’origine du manque d’intégration et travailler sur l’intégration et la maturation grâce au mouvement.
En conclusion
Le Réflexe Tonique Asymétrique du Cou est un véritable pilier du développement, bien avant la naissance et longtemps après.
Lorsqu’il s’intègre correctement, il prépare l’enfant à marcher, regarder, écrire, se concentrer, et même se sentir en sécurité dans son corps.
S’il reste actif, cela peut créer des petites difficultés du quotidien — rien d’inquiétant, mais des signes à écouter.
Avec du mouvement, du jeu et parfois un accompagnement adapté, les enfants rattrapent très bien ces décalages.
Comprendre ces mécanismes permet surtout une chose :
👉 regarder les enfants autrement, avec plus de douceur et de patience.
N’hésitez pas à contacter l’Ecole des réflexes pour tout complément d’informations ou un accompagnement personnalisé.
Cécile Warrot, kinésiologue et enseignante





